Faites vos jeux, rien ne va plus!

Le 18 janvier dernier, une coalition de jeunes militants politiques, allant des Vert’libéraux à l’UDC, a déposé un référendum qui remet en question les fondamentaux de la Loi sur les jeux d’argent. S’agit-il d’une énième bataille entre les anciens et les modernes ou est-ce, en filigrane, le modèle suisse de réglementation des jeux d’argent qui risque d’être soumis à l’épreuve de la roulette russe?

Les auteurs du référendum dénoncent une loi paternaliste qui piétine la liberté d’entreprendre et de jouer en ligne sans entraves. Or, se priver de l’immense terrain de jeu que pourrait devenir Internet leur «fend le coeur». Aujourd’hui, la complexité de la Toile est telle qu’elle ressemble à une jungle opaque, et il est difficile pour nous, pauvres mortels, de se faire une opinion. Cependant, ne soyons pas naïfs, s’y tiennent en embuscade des intérêts pas forcément recommandables. D’ailleurs, il apparaît que le référendum est soutenu par des opérateurs de jeux en ligne, comme par hasard basés dans des territoires offshore et qui échappent à toute réglementation. Or, il me semble que la Loi sur les jeux d’argent a l’avantage de baliser le paysage. Primo, elle renforce la protection contre les excès du jeu (risques de dépendance), les fraudes et le blanchiment d’argent. Secundo, la Loi garantit que les bénéfices engendrés par les jeux d’argent seront redistribués via des projets sociaux, culturels, sportifs ou encore l’AVS. La communauté suisse dans son entier en profite donc, et pas seulement quelques opérateurs privés et illégaux situés dans des paradis fiscaux. Enfin, avant de rebattre totalement les cartes et de casser le modèle économique défendu par ceux que certains appellent des «monopoles», je veux me rappeler ici qu’une part substantielle des revenus des marchands de journaux (qui sont les ambassadeurs de la presse auprès du public) est générée par les commissions que leur rapporte la distribution des jeux. Et l’avenir de ce réseau et des personnes qui l’animent m’importe beaucoup. Passéisme, immobilisme, corporatisme? J’assume tout. Et maintenant, faites vos jeux, rien ne va plus!


LOI SUR LES JEUX D’ARGENT
Adoptée par le Parlement le 29 septembre 2017, la Loi sur les jeux d’argent (LJAr) est soumise à la votation populaire le 10 juin 2018. Elle doit mettre en oeuvre l’article 106 de la Constitution, accepté par le peuple et les cantons le 11 mars 2012. Elle vise à:
• Assurer la protection de la population contre le jeu excessif et la criminalité.
• Lutter contre les offres illégales.
• Garantir que les bénéfices des jeux d’argent soient affectés à des buts d’utilité publique et à l’AVS.